4 Questions à… Patrice Richard

La crise du Coronavirus a sans aucun doute bouleversé l’univers de la distribution. Patrice Richard, Directeur de Performance Distribution et Président de Saint-Gobain Distribution Bâtiment France, revient sur ces évolutions qu’elles soient contextuelles ou pérennes.

Comment se portent nos activités de distribution dans le monde ? 

Les situations sont extrêmement variées. Tout dépend de l’impact des politiques publiques en termes de confinement des particuliers et des restrictions imposées aux différentes activités économiques. Parmi les pays qui se portent le mieux, les pays nordiques sont tous très proches de leurs budgets, parfois même au-delà, c’est remarquable. La France et l’Espagne sont aujourd’hui revenus à d’excellents niveaux, et certaines enseignes ou régions sont en ligne avec leurs objectifs. C’est très bon signe. Le Royaume-Uni a en revanche été le plus durement touché, à cause d’un confinement plus tardif.

Dans tous les pays, nous pouvons observer une remontée extrêmement rapide dès les confinements levés. Il y aura donc probablement un rattrapage général d’ici à l’été. En revanche la rentrée pose un certain nombre de questions, et nous devons nous préparer à différents scénarios si la situation venait à se détériorer.

La crise du Covid-19 a imposé d’adapter les modes de travail voire même de réinventer certains métiers de la distribution. Pensez-vous que cela a été l’occasion de transformer le secteur plus rapidement et durablement ? 

Dans les pays nordiques ou la Suisse, il n’y a pas eu de bouleversement mais simplement une accélération de ce qui fonctionnait déjà bien. En France en revanche, il y a eu des changements spectaculaires, puisque tous les collaborateurs ont été soit en télétravail, soit dans des agences fermées aux clients. Concernant le télétravail, si nous ne pourrons pas concevoir un travail à distance à 100%, nous pouvons imaginer un mode hybride, dans lequel le dosage « présence-télétravail » serait de l’ordre de 70%-30% pour les fonctions support, car quand il faut faire preuve de créativité, d’intelligence collective, il faut se voir. 

Du côté des points de vente, les collaborateurs ont dû apprendre à travailler autrement, sans contact avec les clients. Aujourd’hui certains clients souhaitent rester dans un mode digital, d’autres non, notamment lorsqu’il s’agit de projets pour lesquels ils ont besoin de conseils. La relation reste indispensable. Les commerciaux itinérants qui allaient sur les chantiers ou chez les professionnels sont aujourd’hui limités dans leurs actions. Nous devons donc leur offrir des opportunités sur des tâches plus sédentaires.

Depuis le début de la crise, très rapidement, les différentes enseignes du Groupe dans le monde ont mis en place de nouveaux outils et services pour maintenir le lien avec leurs clients (systèmes de drive, applications, commerce en ligne, etc.). Pensez-vous que leurs attentes ont changé ? Comment voyez-vous la « distribution de demain » ? 

Cette crise aura été ainsi une opportunité pour accélérer mais pas complètement transformer car le développement de nouveaux outils dans la relation client faisait déjà partie de notre stratégie avant la crise. C’est certain, les ventes e-commerce ont atteint des sommets, passant par exemple de 5 à 75% en France à La Plateforme du Bâtiment. L’utilisation des outils audio/sms pour maintenir la relation client a quant à elle été multipliée par 5. Avec la réouverture de nos points de vente tout cela se modère.

Nous ne voulons pas devenir désincarnés ou distants. Les solutions marketplaces ne correspondent pas aux attentes de nos clients. Nos points de vente sont des lieux où ils peuvent trouver des conseils, de l’écoute et du réconfort parfois. Il ne faut surtout pas abandonner cela. En revanche nous devons parallèlement, pousser des solutions pour qu’ils gagnent du temps, qu’ils soient plus efficaces. Pour être parfaitement efficients, les outils (sms, chat, sites e-commerce, etc.) doivent désormais être plus « alignés ». On a inventé le multicanal, il nous faut maintenant développer le « transcanal ».

Autre sujet qui s’est accéléré : la Data. Cette crise a créé un bouleversement de la pyramide de produits consommés par nos clients, des nouveaux clients sont arrivés, d’autres ne sont pas encore revenus. Toutes ces données que nous avons récoltées doivent être analysées pour nous rendre plus réactifs.

Dans un contexte, où santé et reprise économique sont les priorités, qu’en est-il de nos engagements environnementaux ? 

C’est précisément notre positionnement sur l’environnement qui fait la force de notre stratégie. C’est donc le moment d’accélérer sur ce point. Les clients, et notamment les particuliers, ont été très attentifs à ces enjeux avant la crise, ils le seront plus encore après. Nous devons donc continuer à proposer des systèmes constructifs vertueux, qui incluent à la fois des solutions Saint-Gobain de plus en plus respectueuses de l’environnement, et autres produits de notre écosystème de fournisseurs qui le sont tout autant. Nous accompagnons par ailleurs les artisans avec nos outils de formation, tutoriels, programmes de fidélisation et de montée en puissance, pour leur permettre de progresser rapidement sur ces sujets. S’ils sont formés, si la demande des particuliers est là, si nos solutions répondent à ces exigences, tout s’accélèrera pour aller dans le bon sens.

Crédit photo : © Joseph Melun.