Digital pour tous : comment réduire la fracture numérique dans le monde d’après ?

Le confinement nous a fait basculer définitivement dans l’ère du (tout) numérique. Mais tout le monde n’est pas encore prêt pour cette transition : comment réduire le fossé qui se creuse entre les continents ultra-connectés et les pays sans Internet, entre les digital natives et les « illectrés » ?

Transition numérique
« La crise du Covid-19 a donné naissance à une révolution numérique mondiale. Mais pour réussir cette transition digitale, il faut replacer l’humain au cœur de la démarche ! »

Flashback, mars 2020. Au plus fort de la pandémie de Covid-19, 4 milliards d’humains ont été contraints au confinement. Fermeture des écoles. Arrêt brutal des activités. 130 pays placés sous cloche. La Terre semble s’arrêter de tourner… mais pas de vivre. Car même éloignés physiquement les uns des autres, nous conservons, nous autres humains, ce besoin intrinsèque de partager, communiquer, dialoguer. Alors comment socialiser à distance ? La réponse fut vite trouvée. Elle tient à un écran et une bonne connexion Internet !

Accélérateur numérique

En nous poussant dans nos retranchements, la crise sanitaire a clairement accéléré la transition mondiale vers une économie numérique. En quelques jours seulement, la plateforme de visioconférence Zoom est passée de 10 millions à 200 millions d’utilisateurs. Même engouement pour d’autres plateformes comme Hangouts, Jitsi et Teams qui ont vu leur audience exploser, laissant craindre parfois un « blackout » total des réseaux.

Effet papillon

La crise du Covid-19 a eu cet « effet papillon » inattendu : son battement d’aile en Chine a déclenché un tsunami numérique sur la planète. Tout d’un coup, les entreprises ont adopté de nouvelles organisations du travail, facilitées par des outils de productivité et de visioconférence. Les fermetures d’école ont ouvert la voie à l’apprentissage en ligne. La quarantaine a multiplié les cours virtuels (cuisine, sport, etc.) et intensifié l’usage des réseaux sociaux. Très clairement, notre économie se digitalise et transforme durablement le monde en un vaste réseau numérique.

Un fossé numérique sous forme d’illectronisme

Sur le papier, la promesse est belle. Mais dans les faits, la crise sanitaire a mis en lumière une toute autre réalité. Car tout le monde n’est pas suffisamment équipé pour répondre à cette nouvelle injonction numérique. Tout le monde ne dispose pas d’une connexion Internet, ni même de connaissances informatiques suffisantes. En cela, le Covid-19 a creusé le fossé entre les personnes connectées et celles souffrant d’illectronisme (ce mot-valise unit illettrisme et électronique). Pire, la pandémie a renforcé les inégalités déjà présentes pour en créer de nouvelles, à l’échelle d’une région, d’une nation, et même du monde. Gardons à l’esprit qu’aujourd’hui encore, 3,6 milliards de personnes vivent sans connexion Internet dans le monde. Soit la moitié de la planète ! Et la situation est pire dans les pays en voie de développement, notamment sur le continent africain où le taux de connectivité ne dépasse pas 30 %.

De l’Afrique à l’Europe

Au vu de ces données, combien d’élèves ont pu réellement suivre une scolarité en ligne lorsque les écoles ont fermé dans 191 pays ? Pour des millions d’entre eux, la classe à distance s’est soldée par un échec, faute d’équipement adapté ou d’accès à Internet. Ces inégalités sont particulièrement vraies en Afrique subsaharienne, où 89 % des apprenants ne possèdent pas d’ordinateurs, et 82 % ne disposent pas d’accès à Internet

Bien que ces disparités soient plus marquées dans les pays émergents, elles n’épargnent pas l’Europe, où se trouvent encore de nombreuses zones dites « blanches » car non raccordées à l’Internet haut débit. Or, une faible qualité de débit aggrave la précarité numérique, empêchant tout un pan de la population de tirer parti du digital.

Vers un tiers-monde digital ?

Le risque, bien évidemment, c’est que cette fracture numérique se transforme en une faille béante, entre des sociétés hyper-numérisés d’un côté et des pays sous-connectés de l’autre, créant de facto un « tiers-monde digital » à mesure que la transformation s’accélère. Mais peut-on limiter les effets pervers du numérique ? Éviter ce fossé abyssal ?

Oui, car la fracture n’est pas nouvelle. La crise n’a fait qu’exacerber un phénomène grandissant, en pointant du doigt le manque d’équipement, les faibles débits ou les zones sans Internet ou sans alimentation électrique stable. Il ne tient qu’à nous de redresser la barre !

Des initiatives pour réduire la fracture numérique

Et justement, lors de la pandémie de Covid-19, des pays, des entreprises et des ONG se sont engagé, ont montré l’exemple en menant des initiatives solidaires visant à réduire ces inégalités nouvelles. Ainsi, en République Tchèque, le Groupe Saint-Gobain a fait don d’ordinateurs à des familles en grande précarité numérique. Au Liban, l’association Lebanese Alternative Learning a initié un programme d’assistance numérique online et offline auprès de 5.000 collégiens défavorisés. Objectif ? maintenir les élèves dans le système scolaire afin de les accompagner dans la préparation du Brevet national.

En France, l’association Efficience (implantée dans le nord du pays, à Maubeuge) s’est aussi distinguée lors du confinement en prêtant des ordinateurs à une cinquantaine de familles fragilisées. Soutenue par la Fondation de France et par la Fondation Saint-Gobain, cette action a eu un impact positif, en particulier sur la poursuite de la scolarité. « Dans un premier temps, nous avons acquis des ordinateurs d’occasion reconditionnés, que nous avons équipé de la suite OpenOffice, précise Jamel Medjahed directeur d’Efficience. Pour certaines familles, nous avons également prêté des imprimantes, des clés 4G et autres fournitures (encres, etc.) selon leurs besoins. Désormais, nous disposons d’une flotte d’ordinateurs solidaires, pour continuer notre action dans les mois qui viennent. Et demain, nous souhaitons élargir notre activité aux smartphones, car la dématérialisation de la société ne fait que commencer. »

De nouvelles pistes à l‘étude

A la lumière de tous ces éléments, il semble qu’une économie de la sollicitude, circulaire et résiliente, soit une réponse efficace pour pallier le manque d’équipements de certains foyers. « L’inclusion numérique doit devenir une priorité. Au-delà de l’équipement, il faut également accompagner et former les publics éloignés du digital : seniors, personnes avec peu de ressources… A quoi bon fournir un ordinateur si l’on ne sait pas s’en servir ? », conclut Jamel Medjahed. Reste également à mettre en place de nouvelles politiques réglementaires – dans chaque pays - afin d’assurer une répartition équitable de la connectivité et du réseau Internet. Des alternatives au « online » sont également à l’étude, comme le recours aux émissions de radio ou de TV pour soutenir l’apprentissage, dans les régions reculées, ne disposant pas de réseaux fiables.

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