Achat responsable : quand l’entreprise donne corps à ses engagements RSE

À l’heure du développement durable, la politique d’achats des entreprises subit une profonde transformation, vers une approche plus vertueuse et responsable. Véritable levier d’innovation, cette nouvelle stratégie permet aux organisations de réconcilier « prix, performance et engagement social ». Mais quels sont les enjeux liés à cette démarche ? Et comment la mettre en place ?

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Des achats à impact positif
Les Achats Responsables sont souvent source d’opportunités et de « nouveau business »

De nombreuses études l’affirment : les achats responsables constituent désormais un levier de performance et un enjeu majeur pour les organisations. Oui… mais c’est quoi des « achats responsables », pour une entreprise ? Une petite définition s’impose et la norme ISO 20400* éclaire notre lanterne. Quand on parle d’« achats responsables », il s’agit « d’achats dont les impacts environnementaux, sociaux et économiques sont les plus positifs possibles sur toute la durée du cycle de vie. » Au-delà du triptyque « coût-qualité-délais », essentiel à toute stratégie d’achat de biens ou de services par une entreprise, les achats responsables ajoutent donc le ternaire « environnement-éthique-économie ». Et cela change tout.

Comme un électrochoc, les organisations ont compris que surveiller leurs activités, c’était bien, mais tenir compte des enjeux environnementaux et sociaux, sur toute la durée de vie de leurs produits, c’était mieux.

Mais est-ce vraiment la seule raison ?

 

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5 facteurs-clés

Cinq facteurs-clés amènent les organisations à adopter les Achats Responsables. Le premier, c’est tout simplement la conformité à la loi. Face à un contexte réglementaire de plus en plus exigeant, partout dans le monde, s’engager dans cette démarche devient une évidence, voire une nécessité pour se conformer à la législation. Et celle-ci devient de plus en plus drastique envers les maisons-mères et leurs filiales à l’étranger qui ne respecteraient pas les droits humains. Pionnière en la matière, la France et son « Devoir de vigilance » (2017) fait désormais des émules en Europe, incitant les États-membres de l’Union européenne à condamner fermement les entreprises qui enfreignent les libertés fondamentales.

Deuxième point, les entreprises ont tout intérêt à se conformer aux standards internationaux, si elles souhaitent être crédibles et prises au sérieux. Comment peut-on prétendre être leader sur son marché, si l’on ne respecte pas les normes en vigueur ? Crédibilité et engagement nourrissent ainsi la réflexion.
Autre facteur : les Organisations Non Gouvernementales (ONG), disposent aujourd’hui des moyens nécessaires pour dénoncer les mauvaises pratiques. Bénéficiant de relais partout dans le monde, les ONG sont de véritables lanceuses d’alerte, impactant l’image de marque d’une organisation négativement en cas de manquement, ou positivement dans le cas de pratique conforme et vertueuse Or, c’est une évidence : une bonne réputation séduit les clients et conforte les investisseurs dans leur choix.

« C’est pourquoi il est essentiel de rassurer toutes les parties prenantes, estime Cécilia Frasnetti, Directrice des Achats Responsables chez Saint-Gobain, en montrant notre intérêt, notre détermination et nos actions visant à sécuriser nos achats ». Une réassurance qui constitue donc le 4e facteur-clé des Achats responsables.

« Dernier facteur mais non des moindres, les Achats Responsables sont souvent source d’opportunités et de nouveau business », indique Cécilia Frasnetti. Engagés ensemble sur le chemin du développement durable, les entreprises et leurs fournisseurs sont amenés à améliorer leurs pratiques, à développer de nouveaux produits ou procédés industriels qui intègrent les dimensions sociales et environnementales.


 

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Puisant ses valeurs dans la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE), la politique d’Achats Responsables devient donc un atout stratégique pour les organisations. Outre la conformité à la loi, cette démarche structurée permet de s’engager dans la voie du développement durable, d’améliorer son image de marque et de bâtir des collaborations pérennes avec des fournisseurs engagés.

Se pose alors la question du « comment faire ? ». Sur ce point, la norme internationale d’achats responsables ISO 20400 fournit le mode d’emploi, avec une feuille de route précise, qui met l’emphase sur l’intelligence collective.

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Comment déployer une politique d’Achats Responsables ?

En effet, une démarche d’Achats Responsables demande l’implication active du management de l’entreprise qui s’y engage, et ce au plus haut niveau. Pas question de réfléchir tout seul, dans son coin. Cela ne fonctionnera pas. La clé de la réussite passe par une grande transversalité, visant à embarquer l’ensemble des parties prenantes : la direction Achats, les directions financières, juridiques, le Comité de Direction…

Une fois convaincue du bien-fondé de la démarche, la Direction devra s’atteler à la rédaction d’un code de conduite pour bien clarifier ses exigences, sans aucune ambiguïté.
En parallèle, elle
réalisera une cartographie des risques, en portant notamment sa vigilance sur les fournisseurs à faible maturité RSE ou les pays qui n’ont pas le même cadre de référence, en matière de développement durable, d’approche sociale et sociétale. Quelles sont les conditions de travail ? Les normes internationales sont-elles respectées ? La fabrication du produit est-elle respectueuse de l’environnement ?

Si des risques sont identifiés, place aux investigations, avec une revue documentaire ou un audit sur site. L’objectif de l’audit est clair : évaluer les aspects environnementaux, sociaux et légaux des activités de production. Deux possibilités en cas de résultats non satisfaisants : soit le fournisseur a la volonté et la capacité de s’améliorer, et dans ce cas, il bénéficiera d’un accompagnement et d’un plan d’actions correctives. Soit, il n’a ni les moyens ni la volonté, et c’est la fin du partenariat.

Bien évidemment, comme toute stratégie, la politique d’Achats Responsables sera évaluée à l’aide de mesures de la performance. Parmi les indicateurs de suivi : la formation des acheteurs, la présence de critères RSE discriminants dans les appels d’offres, la performance RSE des fournisseurs la diversification du panel de fournisseurs (recours aux fournisseurs locaux, aux structures employant des personnes en situation de handicap, par exemple).

Et n’oublions pas que la réussite d’un programme Achats Responsables ne dépend pas seulement des moyens internes alloués par une entreprise mais également de sa capacité à fédérer ses fournisseurs dans l’atteinte de ses objectifs RSE.

 

Bois, sable et économie circulaire !

Voilà pour la théorie. Mais en pratique, ça se passe comment ? Prenons l’exemple du bois chez Saint-Gobain, une filière qui a fait récemment l’objet d’un audit. Le Groupe a cartographié les risques, afin de mieux prendre en compte les enjeux liés à la déforestation et à la destruction de la biodiversité. Résultat : 95,8 % des achats entrepris par le Groupe sont aujourd’hui des bois responsables. Compte tenu des risques sur certaines zones (notamment en termes de déforestation), certains pays ne sont plus référencés en tant que fournisseurs.

Autre exemple, le sable, destiné aux activités de production verrière, de laine de verre et de mortier. À ce jour, les achats proviennent à plus de 90 % de carrières à ciel ouvert. Avec une épée de Damoclès : celle de la raréfaction des ressources. Le Département Recherche et Développement de Saint-Gobain, en lien avec celui des Achats, a donc eu une idée lumineuse : s’approvisionner ailleurs… mais surtout différemment. Au Portugal, une usine de mortiers de Saint-Gobain jouxte une papèterie, qui utilise ses chutes de papier pour chauffer ses bâtiments. Problème : la chaudière produit des cendres. Beaucoup de cendres… Alors, Saint-Gobain a trouvé la solution, en récupérant ces cendres pour les substituer au sable !

Au vu des nouveaux enjeux, environnementaux, éthique et économiques, il ne fait aucun doute que la politique d’Achats Responsables est un levier majeur dans le développement et la performance d’une entreprise. Cette stratégie, qui s’inscrit dans une démarche RSE, est également un pilier d’avenir pour s’engager dans la décarbonation de l’industrie, avec un impact moindre sur les ressources et une meilleure prise en compte de l’empreinte carbone.

 

* Créée en 2017, la norme internationale ISO 20400 (ISO : organisation internationale de normalisation) donne aux entreprises les lignes directrices pour intégrer les achats responsables au sein de leur stratégie.

 

 

Crédits photos Amnaj Khetsamtip/Shutterstock et Stock Rocket/Shutterstock

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