Entretien avec Pierre-André de Chalendar

Pierre-André de Chalendar, Président-Directeur Général, revient sur la raison d’être de notre Groupe, ce qu’elle dit de nous et comment elle porte nos engagements pour l’avenir.

Quels enseignements retenez-vous de ces derniers mois ? 

Ce que je retiens, c’est d’abord l’engagement sans faille des équipes de Saint-Gobain pour traverser la crise, en donnant du temps pour aider les soignants, en s’adaptant et en se réinventant au fur et à mesure de l'évolution de la situation. 

Action locale et coordination mondiale ont aussi été la clé de notre réactivité, de notre efficacité et de notre résilience, portées par notre modèle multi-local, au plus près de nos marchés, qui nous a protégés de possibles ruptures de nos chaînes d’approvisionnement, et qui nous a permis d’apporter des solutions ciblées et adaptées au contexte local.  

Je l’ai souvent dit, mais nous pouvons sincèrement être fiers du travail accompli et de son impact positif sur un monde touché au cœur par la pandémie. 

A propos d’impact positif, vous avez dévoilé la raison d’être de Saint-Gobain. 

Oui, une page importante s’est écrite dans l’histoire du Groupe. MAKING THE WORLD A BETTER HOME est désormais notre raison d’être. Elle sera notre boussole. Et même au-delà : elle sera notre projet commun. 

« Making the world a better home » : qu’est-ce que cela signifie, précisément ?

Pour moi, l’un des mots les plus importants de cette raison d’être est HOME ! Il est très inclusif, et porte une charge émotionnelle très forte. Il incarne à la fois un besoin fondamental de l’humanité depuis toujours, une aspiration universelle et singulière à chaque endroit du globe, et l’imbrication harmonieuse du matériel et du sensible, de l’intime et du collectif.  En d’autres termes, il traduit l’infiniment petit du foyer de chacun et l’infiniment grand de notre foyer commun : la planète.

Cette raison d’être dit ainsi ce que nous sommes : une organisation multi-locale animée par l’ambition globale de protéger notre planète et d’inventer un futur plus durable. 

Elle acte ce que nous faisons concrètement au quotidien pour remplir cette mission : nous concevons, produisons et distribuons des matériaux et des solutions pensés pour le bien-être de chacun et l’avenir de tous ; et dit notre impact positif et tangible sur la vie de tous, sur leurs façons de travailler, de prendre soin d'eux-mêmes ou de se déplacer. 

Elle révèle enfin notre état d’esprit d’innovation et notre détermination à nous améliorer constamment. 

S’agit-il d’un tournant ? 

Non, il s’agit plutôt d’une explicitation et de la formulation d’un ADN profondément ancré dans l’histoire du Groupe. 

Cette raison d’être, comment s’incarne-t-elle ? 

Elle s’incarnait déjà dans l’esprit collectif et collaboratif qui a présidé à sa formulation. 600 ateliers ont été organisés dans le monde entier. Une plateforme de contribution, traduite dans des dizaines de langues, était ouverte à tous les collaborateurs. Au total, ce sont 15 000 collaborateurs qui ont directement participé à la formulation de cette raison d’être. Nous avons également sollicité nos parties prenantes externes (clients, ONG, investisseurs ou encore partenaires). Tous ont mis leur énergie autour d’un même projet. 

Aujourd’hui, cette raison d’être nous donne une raison impérative d’agir. En déclarant au monde notre engagement, nous n’avons plus d’autre choix que de redoubler d’efforts pour être à la hauteur. Notre raison d’être ne sera une réussite que si chacun, dans son comportement, la met en pratique. Elle nous appelle à innover ouvertement, afin de relever les grands défis auxquels l'humanité est confrontée : le changement climatique, la protection des ressources, et l’inclusion. 

Par quels engagements s’illustre cette raison d’être ?

Ils sont multiples et protéiformes. Certains existent depuis longtemps, comme la Fondation Saint-Gobain – qui permet aux collaborateurs qui le souhaitent de mobiliser leurs compétences pour parrainer des projets favorisant le retour à l’emploi ou l’amélioration de l’habitat de personnes en situation d’exclusion. D’autres sont plus récents, mais tout aussi forts. Tel l’engagement pris par le Groupe en septembre 2019 d’atteindre zéro émission nette de carbone en 2050, qui sera particulièrement structurant. C’est une démarche exigeante mais enthousiasmante qui nécessite des efforts considérables et collectifs – dès aujourd’hui. Elle inscrit Saint-Gobain dans le temps long et contribuera à faire vivre notre raison d’être.

Selon, vous, y a-t-il un risque que la crise économique relègue au second plan les enjeux de transition énergétique ?   

Au contraire ! La crise sanitaire a accéléré la prise de conscience environnementale et sensibilisé l’opinion publique aux liens entre santé et environnement. 

Par ailleurs, les pouvoirs publics s'impliquent à un niveau sans précédent à travers des plans de relance dont les centres de gravité sont de plus en plus verts. En Europe, 30% du plan de relance de 750 milliards – c’est énorme ! – est consacré à la transition écologique. 

Une fenêtre de tir historique s’ouvre donc. Il nous faut mettre toute notre énergie pour infléchir l'histoire. Les décisions fortes se prennent aujourd’hui. 

Demain sera donc plus durable ?

Oui ! Mais pas seulement. Deux autres tendances de fond se sont accélérées : demain sera résolument plus local et toujours plus digital. 

Nous en avions déjà pris la pleine mesure avec notre plan de transformation annoncé fin 2018 et notre nouvelle organisation, plus proche des clients, s’est confirmée comme un atout essentiel durant les mois de confinement. Quant à la digitalisation, elle a soutenu notre activité, nous permettant de continuer à servir notamment les petits artisans, dont la majorité a continué à travailler pendant le confinement. Là où dans certaines enseignes, nous n’avions parfois que 5 % de commandes passées via Internet avant la crise sanitaire, nous sommes parfois passés 75 % au pic du confinement. C’est par exemple ce qui s’est passé en France avec La Plateforme du Bâtiment. De nouvelles habitudes ont été prises et elles perdureront. Et ce n’est que l’une des facettes du digital. Que dire de la maquette numérique par exemple, qui transforme déjà la construction en permettant de construire mieux, mais aussi plus durable ? 

Comment voyez-vous l’avenir du Groupe ? 

Avec optimisme. En observant les tendances mondiales, je suis convaincu que le Saint-Gobain post-Covid a de meilleures perspectives de croissance que le Saint-Gobain d'avant Covid. Forts de nos 170 000 talents, munis de la boussole ambitieuse et partagée que constitue notre raison d’être, nous ferons collectivement face aux incertitudes de demain, comme nous avons résisté au gros temps d’hier. Et nous ferons du monde une maison commune plus belle et plus durable.