Le fact-checking des critères ESG
ESG : un acronyme qui fait parler de lui dans le monde de l’entreprise et des finances. Derrière ces trois lettres, se cache un sigle vertueux « Environnement Social Gouvernance », mais aussi beaucoup d’incompréhensions et d’a priori. Entre faux amis et vrais impacts, idées reçues et inexactitudes, on décrypte pour vous la réalité des critères ESG avec un fact-checking clair et net.

1. L’ESG c’est la gouvernance sociale et environnementale / FAUX
Très prisés du monde de la finance, les critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG), sont également connus sous le terme « critères extra-financiers ». En substance, ces critères « permettent d’évaluer un acteur économique en dehors des critères financiers habituels que sont la rentabilité, le prix de l’action et les perspectives de croissance », selon l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) en France. Une définition largement partagée par les autres marchés. En soi, les facteurs ESG interrogent un large éventail de pratiques afin d’évaluer le comportement vertueux – ou pas – d’une entreprise en matière de développement durable, d’éthique et de bonne gouvernance.
Les 3 piliers de l’ESG sont :
Critère environnemental : gestion des déchets, consommation énergétique, préservation des ressources, réduction des gaz à effet de serre, consommations en eau et préservation de la biodiversité et prévention des risques environnementaux.
Critère social : sécurité et prévention des accidents, formation du personnel, dialogue social, parité et diversité, qualité et conformité des produits…
Critère de gouvernance : respect des droits humains, la conformité, achats responsables, lutte contre la corruption, l’attention aux communautés locales et aux parties prenantes, indépendance du conseil d’administration, transparence de l’information (rémunération des dirigeants, relations avec les actionnaires)…
2. RSE, ESG : tout ça c’est pareil / FAUX
Très clairement, la RSE et les critères ESG ont le même ADN, mais ils ne sont pas « jumeaux ». En fait, les facteurs ESG servent aux investisseurs à mesurer la performance RSE (responsabilité sociale des entreprises) d’une entreprise, vis-à-vis de ses parties prenantes : salariés, partenaires, sous-traitants, clients, investisseurs... En clair, les critères ESG servent d’indicateurs et permettent de réaliser une analyse extra-financière de l’entreprise. Les parties prenantes autres que les investisseurs utilisent le terme de RSE.
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3. C’est l’ONU qui a inventé les critères ESG / VRAI
C’est Kofi Annan qui a « inventé » et popularisé les critères ESG en 2004, dans le cadre du Pacte mondial des Nations unies. A l’époque, l’ancien secrétaire général des Nations unies a lancé un appel auprès de 50 dirigeants de grandes institutions financières pour les inciter à intégrer les questions ESG sur les marchés financiers. Un an plus tard, Ivo Knoepfel, analyste financier, rédige un rapport Who cares wins (Qui s’en soucie gagne) qui montre que l’intégration des questions environnementales, sociales et de gouvernance amène à une meilleure performance des entreprises. Les critères ESG venaient de naître !
4. Les critères ESG, c’est juste de la com’, du greenwashing de plus / FAUX
Mesurer les critères ESG d’une entreprise repose sur des rapports très détaillés des actions menées en entreprise sur tous les aspects « Environnement, Social et de Gouvernance ». Ces données sont donc quantifiables, mesurables et vérifiables. Par contre, ces données ne sont pas standardisées et leur interprétation par les parties prenantes suivent des méthodologies individuelles. On est loin du greenwashing, puisque les critères ESG sont publiés en toute transparence et accessibles à toutes les parties prenantes. Mais, l’interprétation des agences de notation extra-financière est individuelle. Ainsi, pour les mêmes données, certaines parties prenantes estiment la performance bonne et d’autres mauvaises.
5. Les critères permettent d’aiguiller ceux qui veulent investir dans des entreprises responsables / VRAI
L’investissement dit « durable » ou « responsable » prend ses sources dans les critères ESG d’une entreprise. Ces derniers servent de grilles d’évaluation et d’analyse extra-financières pour tous)..
Il existe, du reste, différentes approches pour choisir un investissement ESG.
L’essentiel est que le produit financier proposé par les investisseurs apporte une contribution positive sur la planète ou les hommes. En cela, les critères ESG jouent les catalyseurs pour attirer les investisseurs potentiels. Cerise sur le gâteau : ils valorisent l’image de marque d’une entreprise engagée dans une démarche RSE.
6. Les critères ESG sont les mêmes partout dans le monde / FAUX
Hélas non, il n’existe pas encore de normes officielles, mondialement acceptée, concernant les critères ESG. Les critères ESG dépendent du secteur d’activité de l’entreprise et des orientations méthodologiques de l’évaluateur qu’il soit une agence ou un investisseur individuel. De plus en plus, les investisseurs se regroupent au sein d’initiatives plus globales comme les PRI (Principles for Responsible Investment) dans le cadre des Nations unies ou Climate 100+ réunissant des investisseurs engagés pour la lutte contre le changement climatique. …, les choses bougent et les mentalités évoluent.
7. Les critères ESG peuvent évoluer dans le temps / VRAI
Oui, rien n’est figé dans le marbre. Les gestionnaires de portefeuilles ont toute latitude pour déterminer les critères ou les ratios les plus pertinents en fonction des impacts sur l’environnement, les hommes et la société ou en fonction de la « maturité » du sujet et la capacité des entreprises à s’engager.
8. Respecter les critères ESG, ça réduit la rentabilité d’une entreprise / FAUX
Faux. Pourquoi ? D’abord parce qu’une marque engagée, qui tient compte du climat, de la planète et de ses collaborateurs, a plus de chance de séduire les clients qu’une marque lambda, surtout dans les pays portés par le développement durable. Par ailleurs, en se fixant des objectifs d’efficacité énergétique ou de préservation de ressources, l’entreprise devient plus frugale : ses coûts de gestion (eau, énergie, etc.) sont donc diminués. Enfin, les entreprises dites « à impact » ont également plus de chance de gagner la confiance des investisseurs.
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9. Les critères ESG, ça ne parle qu’aux jeunes / FAUX
Les critères ESG sont avant tout des indicateurs extra-financiers faits par et pour le monde de la finance. Ils s’adressent donc d’abord aux investisseurs, aux financiers et aux entreprises cotées en Bourse et sont encore peu connus chez les jeunes même si, en effet, ces derniers ont développé une conscience environnementale et sociale qui devraient dans les années à venir les rendre particulièrement réceptifs à l’importance de ces critères.
10. Les critères ESG, c’est juste une mode éphémère / FAUX
On aurait pu croire à un caprice mondain et financier, mais au fil des années, les critères ESG ont su s’imposer au point de devenir aujourd’hui incontournable sur de nombreuses places boursières. Ainsi, la part des investisseurs pour les fonds responsables ne cesse de croître. Selon une étude*, près de 650 milliards de dollars ont été investis dans les fonds ESG en 2021 dans le monde, contre 285 milliards en 2019. Soit + 365 milliards d’investissements supplémentaires en deux ans, ce qui montre la belle dynamique de marché.
11. Les critères ESG, est-ce que ça veut dire que la finance va sauver le monde ? / VRAI ET FAUX
Sauver le monde ? Peut-être pas, mais prendre part au développement de pratiques vertueuses, plus durables, inclusives et transparentes : pourquoi pas ? L’émergence des critères ESG et des fonds responsables poussent les entreprises à prendre de « bonnes décisions ». Partout dans le monde, on assiste à une réallocation des capitaux vers les énergies renouvelables, la transition énergétique. Certains établissements bancaires arrêtent même de financer certains projets « trop carbonés » à leur goût au profit de « projets climatiques », ou d’investissement à impact, notamment social ou inclusif. Une chose est certaine : une finance plus responsable peut contribuer à un monde meilleur.
* Refinitiv/Lipper (nov. 2021)
Crédit : AS photostudio/Shutterstock